En effet, entre résurgence des tensions géopolitiques au Proche-Orient, interrogations quant au calendrier de baisse des taux directeurs des banques centrales et retour du risque politique en zone euro, les marchés ont été confrontés à des vents contraires, avec cependant de fortes disparités selon les zones géographiques, notamment de part et d’autre de l’Atlantique. Ainsi, au terme de ce 1er semestre, les actions mondiales, représentées par l’indice MSCI AC World, affichent un gain de 13% depuis le début d’année (en USD). Les marchés américains bénéficient d’un environnement toujours favorable, tirés par les valeurs technologiques _ notamment le segment des semi-conducteurs, sur fond d’engouement pour le thème de l’Intelligence Artificielle. Les indices S&P 500 et Nasdaq ont inscrit de nouveaux records en fin de semestre, progressant respectivement de +15.3% et +18.5% depuis le début d’année. En revanche en zone Euro, l’évolution n’a pas été aussi favorable, la résurgence des risques politiques en fin de période ayant entrainé un regain de volatilité sur les places boursières. L’indice Eurostoxx 50 parvient néanmoins à afficher une progression de près de 13% depuis le 1er janvier. Le CAC 40, qui avait dépassé les 8 200 points en fin de 1er trimestre, a payé le plus lourd tribut de l’incertitude politique des dernières semaines, effaçant tous les gains acquis au cours des 3 premiers mois de l’année. Il parvient tout juste à l’équilibre avec une modeste hausse de +1,22% à fin juin. Le marché japonais continue sur sa lancée de 2023, l’indice Nikkei affichant un gain notable de plus de 19% sur les 6 premiers mois de l’année, soutenu par la faiblesse du Yen, une consommation robuste et la bonne tenue du secteur technologique. Quant au marché chinois, il progresse de près de 5% depuis le 1er janvier. Après un bon démarrage sur les premiers mois de l’année, la croissance enregistre un nouveau ralentissement et les perspectives restent modestes. Au niveau sectoriel en Europe, les bancaires, la Technologie, la Santé, les Médias et l’Industrie affichent les meilleures performances au sein de l’indice Stoxx Europe 600. Les secteurs défensifs des Services aux collectivités et des Boissons & Alimentation sont en revanche délaissés par les investisseurs au profit de valeurs plus cycliques. L’immobilier reste également en retrait, le niveau encore élevé des taux d’intérêt pesant sur les actions foncières.
Sur les marchés obligataires, le regain de volatilité sur les places européennes et le climat d’incertitude qui en découle a profité aux taux à 10 ans allemand et américain en fin de semestre, dans un mouvement de fuite vers la qualité. Les rendements à long terme se font ainsi détendus depuis les pics enregistré un mois auparavant. Cela étant, ces derniers restent globalement élevés dans un contexte où l’inflation _ bien qu’en repli, reste persistante, notamment aux Etats-Unis, ce qui pénalise les cours des obligations depuis le début de l’année. Le Bund allemand et le T-Notes américain terminent respectivement à 2.50% et 4.40% à fin juin (vs 2.02% et 3.87% resp. fin décembre).Le prix du pétrole, après un rebond à plus de 86 dollars le baril WTI du Texas en avril sur fond de résurgence des tensions géopolitiques au Proche-Orient, est revenu en fin de semestre à plus de 81 dollars, en hausse de 14% depuis le début d’année. Les cours restent soutenus par une offre contrainte, les pays de l’OPEP+ s’étant accordés début juin sur l’extension jusqu’à fin 2025 de leurs coupes actuelles de production dans un contexte incertain. L’or a poursuivi son ascension, dépassant le seuil de 2 400 dollars l’once en mai, après un précédent record en mars. La classe d’actifs bénéficie à la fois de sa qualité de valeur refuge dans un contexte géopolitique tendu mais également d’achats massifs de la part des banques centrales (en particulier émergentes), qui souhaitent diversifier leurs réserves.
L’annonce était attendue depuis plusieurs semaines par les investisseurs : la Banque Centrale Européenne (BCE) a baissé ses taux directeurs d’un quart de point lors de sa réunion du 6 juin dernier. Le taux de refinancement (taux auquel les banques commerciales peuvent emprunter de l'argent auprès de la BCE pendant une semaine) est ainsi passé de 4.50% à 4.25%. Il s’agit de la première baisse depuis septembre 2019, sachant que la BCE a amorcé à partir de mi-juillet 2022 le plus fort resserrement monétaire de son histoire afin de lutter contre une inflation extrêmement élevée, due aux perturbations des chaînes mondiales d'approvisionnement liées à la pandémie de Covid-19, puis à la flambée des prix de l'énergie suite au conflit géopolitique russo-ukrainien. Aux Etats-Unis, l’heure n’est pas encore à l’amorce d’une détente monétaire, l’inflation restant tenace (les prix à la consommation ont progressé de 3.3% sur un an à fin mai 2024), sur fond de bonne santé de l’économie. Lors du dernier comité de politique monétaire début mai, il a été rappelé que plusieurs chiffres « rassurants » sur l’inflation seront nécessaires pour pouvoir entamer le cycle d’assouplissement monétaire. Une première baisse de taux est cependant attendue dans les prochains mois.
L’annonce du Président de la République Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale quelques minutes après l’annonce des premiers résultats des élections européennes le 9 juin dernier a été un véritable choc politique qui a pris de court bon nombre d’investisseurs, avec pour conséquence un important regain de volatilité sur les places européennes, en particulier française, en raison du nombre d’interrogations qu’une telle décision peut susciter.Conséquences directes : l’indice CAC 40 a décroché de plus de 6% la semaine suivant cette annonce présidentielle, avant de se stabiliser quelque peu. De vives tensions sont apparues sur l’emprunt d’Etat à 10 ans français, l’OAT 10 ans, qui s’est tendu à 3.3% le 10 juin, creusant de fait l’écart avec le Bund allemand (la référence en zone euro). La devise européenne a quant à elle sensiblement baissé face au dollar (parité €/$ de 1.07 au 28 juin), dans une situation où l’Europe paraît affaiblie. Pourquoi une telle réaction des marchés ? Les investisseurs ont de suite craint pour la stabilité financière de la France, avec, en fonction du résultat anticipé et au regard des programmes présentés par certains partis, une inévitable aggravation de la dette et du déficit public du pays. Cette annonce est intervenue alors même que la note souveraine du pays venait d’être dégradée quelques jours plus tôt par l’agence Standard & Poor’s, de AA à AA-, en raison de déficits se creusant de plus en plus. Depuis 2019, la dette publique française s’est envolée, à plus de 3 000 Milliards d’euros, pour atteindre 110% du PIB au T4 2024. En parallèle, le déficit public apparaît bien plus élevé que prévu, s’établissant à 5,5% du PIB en 2023, loin de l’objectif cible de 3% maximum. Ce sont les banques françaises, très exposées à la dette et à l’économie française, qui ont été les plus impactées d’un point de vue boursier.
La volatilité devrait rester de mise sur les places financières, que ce soit à court ou moyen terme, tant au regard des incertitudes politiques en France que dans la perspective des élections présidentielles américaines en fin d’année.Plus globalement, la croissance mondiale devrait se stabiliser en 2024, pour la première fois depuis trois ans, mais à un niveau relativement faible par rapport aux tendances historiques récentes, comme le souligne la Banque Mondiale dans son dernier rapport. L’inflation mondiale devrait en parallèle refluer à 3,5 % en 2024, puis 2,9 % en 2025*. En zone Euro, la croissance est plus faible, mais de premiers signes vraiment encourageants sont palpables (indicateurs d’activité, consommation des ménages). Aux Etats-Unis, la croissance continue d’être étonnamment résiliente, avant un possible essoufflement d’ici la fin d’année. En effet, la consommation, principal moteur de la croissance américaine, s’est montrée moins solide qu’attendue au 1er trimestre, tendance qui devrait se poursuivre au deuxième trimestre, l’environnement de taux élevés rendant de plus en plus compliqué le recours à l’emprunt.En termes de politique monétaire, des interrogations sur le rythme de baisse des taux directeurs des banques centrales (BCE et Réserve Fédérale américaine) devraient persister, alimentant ainsi la volatilité sur les obligations gouvernementales. Enfin, le climat géopolitique reste tendu et toute dégradation de la situation pourrait avoir un impact direct sur le cours de l’or noir, et par là même sur l’inflation.
Andrey PAMPOUILLEInvestment Specialist Solutions Financières BNP Paribas Epargne & Retraite Entreprises
Wenzhao SUN, CFA Responsable Solutions Financières BNP Paribas Epargne & Retraite Entreprises
Source indices : Bloomberg, au 28 Juin 2024 ; indices publiés dividendes réinvestis et en devises locales
NB : La valeur des investissements et les revenus qu'ils génèrent peuvent enregistrer des hausses comme des baisses et il se peut que les investisseurs ne récupèrent pas l'intégralité de leur placement. Les performances passées ne préjugent pas des performances à venir.
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